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Rame, rame, rameurs, ramez !

Vous connaissez le site VDM ? Vie De Merde, oui oui.

Aujourd’hui, c’est à mon tour de vous raconter une petite expérience un peu inédite, un peu inattendue, un peu… bon, qui fait chier, on va pas se mentir.

Et comme je ne recule jamais devant des nouvelles expériences, j’ai testé pour vous : l’hôpital en Australie.


Le moment était parfaitement idyllique. Plage de Cape Tribulation, trésor du continent australien, fierté de tout un peuple. Cape Tribulation, là où deux patrimoines mondiaux se rejoignent : la forêt tropicale de Daintree et la Grande Barrière de Corail.

Il était 21h, il faisait nuit noire. J’étais allongée sur le sable avec deux amis, à contempler le ciel incroyablement clair et étoilé (difficile de trouver de la pollution lumineuse au-dessus d’un océan et d’une forêt tropicale).

A quelques mètres de là, un feu de camp sur la plage.

Le cadre était idyllique, vous dis-je. Oui mais voilà, un coup de vent, et tout est retourné.

Vous me croyez poète ? Et bien détrompez-vous : un coup de vent, et l’instant magique est ruiné. Car en étant allongé sur le sable, on ne pense pas forcément à tous les risques épouvantables auxquels on s’expose. Tous ces risques considérables dont on ne se méfie pas. Dans un tel moment de magie, on oublie qu’en Australie, toute créature vivante et tout élément inerte veut nous tuer. Alors, oui, quand on pense “danger australien”, on pense crocodiles, requins, serpents, araignées et méduses ! Mais on ne pense pas assez au pouvoir d’un grain de sable.

Un coup de vent plus tard, mon oeil droit était visité par un grain de sable. Pas facile de continuer à regarder les étoiles après ça, me direz-vous.

Ni une ni deux, je me relève, frotte mon oeil. Ça va bien finir par partir, ce n’est qu’un grain de sable après tout.

Après 5 minutes de lutte, l’intrus est toujours là. Bon… Un coup d’eau pour aider à faire partir, et dans 5 minutes je suis de retour devant ce magnifique spectacle céleste.

30 minutes plus tard, retrouvez Mathilde allongée sur un lit dans un bungalow, à se plaindre et grogner. Penchée au-dessus de cette masse inutile, 4 copines se bousculent pour tenter de trouver ce foutu grain de sable, en aspergeant mon pauvre oeil bleu (et rouge, donc) de larmes artificielles.

Rien à faire. Mon oeil a très nettement beaucoup plu à ce grain de sable, qui y installe ses quartiers.

Imaginez qu’à chaque clignement, un grain de sable vous gratte l'oeil et se déplace. Ça rend fou. Ça donne même plus précisément envie de se taper la tête contre les murs. Tous les murs (bon, y’en a pas tant que ça au milieu d’une forêt, mais vous avez compris l’idée).

C’était donc se taper la tête contre les murs… ou aller dormir. J’ai choisi la deuxième option, en espérant que le corps humain soit si formidable qu’il nettoie tout seul mon oeil pendant la nuit.


Ha oui mais non, ça aurait été trop beau. 8 heures plus tard, le réveil sonne. Machinalement, j’ouvre les yeux… et les referme aussitôt. Putain, il est toujours là le con !

Ça paraît futile un grain de sable. C’est tout petit, ça s’envole facilement… On va pas chipoter pour un grain de sable dans l’oeil quand même. Oui mais voilà, ça fait maintenant 12 heures qu’il est coincé dans mon oeil et qu’il ne veut pas partir. Sauf que, rappelez-vous, je suis au milieu de la forêt tropicale. A part des lianes et des araignées, il n’y a pas grand chose autour de moi. Pas de pharmacie, pas de médecin (pas Internet non plus, et pas de réseau… Mais ceci n’a aucun rapport avec mon histoire. Enfin si, pas moyen de prendre rendez-vous ?).

A 10h, nous prenions le car direction Cairns. Enfin bientôt de retour à la civilisation !!! Je vais pouvoir trouver quelqu’un pour m’aider !!

Pendant les 3 heures de route, j’ai eu le temps d’être bien agacée à chaque fois que je clignais des yeux. J’ai pas compté, mais ça doit bien faire des milliers d’agacements. C’est beaucoup trop pour un seul homme. J’ai donc pris une sage décision en fermant les yeux, pour m’éviter toute cette souffrance inutile.

C’était sans compter sur les petites routes de campagne australienne et ce chauffeur de car beaucoup trop passionné : un virage, l’iPhone qui glisse. Le bruit de la chute me fit ouvrir les yeux.

Trop tard, donc. C’est à l’arrêt suivant, quand j’ai pu me lever, que j’ai découvert avec effroi l’état de mon écran de téléphone (enfin à ce moment-là je ne voyais qu’avec un seul oeil, l’autre étant constamment flou à cause des larmes. Donc ça ne paraissait pas si terrible que ça. Illusion !).

C’est dans ces moments-là, quand la malchance s’accumule, qu’on se dit que vraiment, c’est une bonne journée de merde qui commence.

Bref, 13h, arrivée à Cairns. Check-in à l’hôtel, puis sprint direction le centre commercial le plus proche pour acheter des larmes artificielles, car oui, à force, l’oeil est irrité et ça brûûûûûûle !!

Les larmes, ça soulage, mais ça guérit pas. Il me fallait de toute urgence me rendre chez un médecin. Et si ça s’infectait ? Et si mon oeil s’abîmait après tous ces frottements ?


Oui, sauf que je ne suis pas australienne, donc je ne bénéficie pas de Medicare (la sécurité sociale). Cependant, avec le Visa étudiant, il est obligatoire de souscrire à une assurance maladie spécifique. Elle s’appelle l’OSHC (Overseas Student Health Cover), et est assurée par Allianz Global.

Mon réflexe donc : téléphoner à Allianz pour savoir quels types de soin sont couverts, afin d’éviter d’avoir à payer de ma poche quelques centaines de dollars pour quelque chose d’aussi ridicule qu’un grain de sable. Ha mais oui mais on est samedi, c’est fermé. Au top le service les gars, merci ! La prochaine fois je ferai en sorte de souffrir seulement aux heures de bureau.

Pas le temps d’attendre, je me mets en route, seule, vers l’Hôpital de Cairns. 35 minutes de marche plus tard, j’arrive aux urgences. L’infirmière me grille dès le début (la panique révèle le french accent, apparemment), et m’indique, avec un grand sourire, que les soins d’urgence ne sont pas couverts par l’OSHC et qu’il me faudra donc débourser 400$ pour une admission dans le service, sans compter l’intervention. Elle est quand même sympa car elle m’indique un autre hôpital, privé qui ne me demandera “que 80$ !”. La vie est fantastique, j’ai trouvé une friperie de soins médicaux.


D’après l’infirmière, c’est à 2 blocs d’ici. Alors soit elle ne sait pas compter, soit je ne sais pas compter, mais il y a quelqu’un qui ment dans l’histoire. Il m’aura fallu au moins 20 minutes supplémentaires pour trouver ce foutu hôpital. 20 minutes, c’est peu, c’est vrai (“Allez, c’est bon, fais pas ta feignasse !”). Mais 20 minutes à marcher avec un oeil rouge qui pleure, et une douleur qui rend fou, c’est long.

Arrivée à destination, je me rends au comptoir. L’infirmière n’aura pas eu besoin de demander ce que j’avais “Ha… C’est donc votre oeil”. Zut, ça se voit tant que ça ?? Un formulaire à remplir, 20 minutes d’attente seulement, et me voilà dans le cabinet d’un docteur.


Qu’est-ce qui vous amène ici ?”. Ne sois pas hypocrite, s’il te plaît, Jean-Michel. Je sais que tu sais. Et tu sais que je sais que tu sais. Alors on va arrêter les politesses et tu vas gentiment me retirer ce grain de sable avant que je m’arrache l’oeil avec une petite cuiller. (Oui, après maintenant 19 heures de douleur, je perdais mon sang-froid).


Vous avez bien fait de venir. Si ce n’est pas parti avec des larmes artificielles, de l’eau et du sommeil, c’est que le corps étranger est coincé et qu’il faut l’aider à sortir ! Il ne faut jamais rester trop longtemps avec quelque chose dans l’oeil, au risque de le laisser s’infecter”. Merci de justifier tout cet investissement, c’est vraiment sympa de me soutenir et m’encourager dans ma démarche !


Allongez-vous. Détendez-vous, ne paniquez pas”. Non non bah non y’a rien de paniquant, tu viens de me mettre du colorant orange dans l’oeil, tout ce qu’il y a de plus normal ! Ha et donc maintenant tu éteins la lumière, c’est sympa tout ça ! Je crie maintenant ou dans 10 secondes ? Aïe, pourquoi tu me mets une lumière fluo en plein dans l’oeil, c’est pas agréable. T’aimerais que je te mette une lumière dans l’oeil toi ??


Votre cornée est intacte, aucun problème, elle n’a pas été abîmée. Vous êtes arrivée à temps apparemment !Je ne serais pas restée un jour de plus dans la jungle avec du sable dans l’oeil de toutes façons. Pas de bus ? Je serais rentrée en crocodile, rien à foutre. Mais sinon à part ça, je suis vraiment ravie de savoir que mon oeil va rester bleu et que ma vision ne sera pas altérée.


En revanche, je ne vois vraiment rien…Sans rire ? C’est pas comme si j’avais pas déjà regardé 72 fois pourtant…


Bon, je vais vous retourner la paupière. Ça ne va pas être agréable, mais je pense que le grain de sable est caché en-dessous.Aïe. Aïe, ça fait mal, arrête. Mais aïeuuuhhhh !Là !! Voilà !!! Je l’ai !!!! Regardez.” Sérieusement..? C’était ça..? Juste ça…? Un minuscule petit point noir sur ce coton-tige. Et ça va me coûter combien ce minuscule point noir ? Vas-y, fais-moi rêver.


Laissez-moi vérifier la paupière inférieure. Rien. Bon bah c’est parfait ! Tout va mieux ?Laisse-moi me relever, pleurer du colorant orange, et je te dis. Haaaaaa bah enfin ! Voilà ! Là on est d’accord, là ok ! Merci, merci, merci, j’peux te faire un câlin ? Non parce que vraiment là MERCI !


Ne paniquez pas, votre oeil est jaune.Ha. Bah bleu, rouge, jaune… J’ai toujours été très couleurs primaires de toutes façons.


Bon, avec l’intervention - qui était nécessaire - ça fait un peu monter le prix… Je vous laisse voir avec mes collègues à la réception”. Monter… C’est à dire ? Non parce que c’est mon dernier jour de vacances là, donc j’ai explosé les dépenses ces 8 derniers jours, et j’avais pas trop prévu d’avancer des centaines de dollars pour un grain de sable.


Ça fera donc 70$ pour le rendez-vous, et 80$ pour l’intervention. Vous souhaitez payer comment ?Bah pas en fait. Je préfèrerais ne pas payer. Mais s’il faut vraiment… Voilà ma carte.


Après avoir rentré mon PIN, je demande au réceptionniste “Pourriez-vous m’imprimer un justificatif et un reçu, afin que je puisse réclamer mes sous auprès de l’OSHC ?”. “Euh, excusez-moi mademoiselle… Vous avez une OSHC ?” “Bien sûr, pourquoi ?” “Pourquoi vous ne nous l'avez pas dit avant ?” “Parce que vous ne me l’avez pas demandé ?” “Ha… C’est notre faute alors. Vous avez payé plus que ce qu’il ne fallait. Mais maintenant que le paiement est passé, je ne peux pas revenir en arrière, désolée. Je vous laisse gérer avec l’OSHC.Ha bah oui, au top tiens. Un portable cassé, une journée compliquée, et maintenant je suis fauchée !

Il me restait quelques 20$ à dépenser dans des gouttes prescrites par le médecin contre les infections. C’est officiel : j’ai retrouvé la vue ! Mais je ne mangerai plus pendant 3 semaines. Enfin pas de quoi se plaindre non plus, c'est bon les noodles ! (et ça ne coûte que 1,5$)


Ha si si en fait. Car en sortant de l’hôpital, alors que je commence à marcher en direction de mon backpacker, soulagée parce que “tout est bien qui finit bien”… Bim, orage tropical. Le genre d’orage qui met environ 4 secondes à arriver, donc pas facile à anticiper. Le genre d’orage qui te verse 10 litres d’eau sur la tête en 40 secondes.

Enfin m’en fous, tant que c’est de l’eau qui tombe et pas du sable…


Ma punition pour les prochains jours : 2 gouttes 3 fois par jour, et pas de maquillage. Peut-être que je devrais ne jamais quitter mes lunettes de soleil aussi. Et le début d’un parcours du combattant pour récupérer mes 150$, évidemment.



Moralité : tout veut vous tuer en Australie, même le sable.



(Mes amis restent persuadés que j'ai fait ça pour en arriver là)

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